La Traviata


Mes amis, mes amours,

Samedi 15 septembre 2012, 19 h 30.
La Place des Arts, Salle Wilfrid-Pelletier.
Opéra de Montréal, La Traviata de Verdi.

Je prends ma place à 19 h 15.  Siège T44. Je suis très bien située, c'est-à-dire au parterre, non loin de la scène et non loin de la porte de sortie.



Pour la Xe fois, je lis dans le fascicule l'histoire de Violetta et son amour pour Alfredo, ses problèmes d'argent, la demande insistante du père d'Alfredo pour qu'elle quitte son fils, la lettre d'adieu, le sacrifice, l'insulte, l'agonie et la mort de Violetta. Opéra en trois actes.

Les lumières sont tamisées et l'orchestre débute.  Dès que les premières notes sortent de la fosse et se dispersent dans la salle, mon tympan capte le bruit désagréable de la respiration profonde de mon voisin de droite. Une pompe à succion. Impossible pour moi de me concentrer sur la voix de la soprano qui apparaît sur scène. Je n'entends que l'aspirateur.  Je mets ma main droite en coupole par-dessus mon oreille pour bloquer le bruit de sa respiration tout en écoutant l'opéra. Inefficace. Je bouche mon oreille droite avec mon index pour éliminer totalement le bruit venant de ma droite. Inefficace. Je me retourne à plusieurs reprises pour regarder mon voisin avec de gros yeux méchants. Inefficace. Je me penche vers mon voisin de gauche pour m'éloigner de la balayeuse. Inefficace. Je suis exaspérée. Ce crétin est en train de ruiner ma soirée. 

Heureusement, après 35 minutes, le premier entracte.

Je suis décidée à mettre fin à mon calvaire en obtenant un autre siège. Je vais immédiatement consulter un placier. Je lui fais part de mon problème dont la seule solution est de trouver un autre siège à moins que mon voisin décide d'arrêter de respirer. Le placier m'informe que la salle est complète, mais il me promet d'envoyer son superviseur pour trouver une solution. Il prend en note mentalement mon siège et la couleur de ma robe (la dame en rouge à T44). Je retourne sagement à mon siège et j'attends. J'ai cependant de l'espoir, car dans la rangée devant la mienne, vers la gauche, se trouvait, lors du premier acte, deux places libres.  Maintenant, tout ce que je puisse espérer c'est que les deux personnes absentes ne soient pas en retard, mais bien tombées dans un fossé et que les places soient encore disponibles au début du deuxième acte. J'attends impatiemment. Cinq minutes avant la fin de l'entracte, qui vois-je arriver dans la rangée devant la mienne ? Cynthia, une de mes amies, qui a la mauvaise habitude d'être toujours en retard!  C?!@#* de t?!#*!!@!!! Je viens de perdre ma place!  Je la salue chaleureusement ainsi que son ami et je les regarde s'assoir, un grand pincement au coeur. Mais, à cet instant même, la superviseure vient me retrouver à ma place.  Je lui suggère de discuter plus loin puisque mon aspirateur était déjà de retour. Elle pense avoir la solution parfaite à mon problème. Le siège D30 était vide lors du premier acte. Nous nous dirigeons vers la scène, mais malheureusement, la personne était également en retard et non dans un fossé au bord de la 20. Seule issue possible, un siège d'employé à la Corbeille. À la Corbeille!  C'est prometteur... Je n'ai pas le choix, j'accepte.

Je prends ma place dans la Corbeille et le deuxième acte commence. Finalement ce n'est pas si mal, les sièges d'employé sont contre le mur du fond, sont surélevés et le son est meilleur qu'au parterre. Dès que les premières notes se rendent à mes oreilles, le système de ventilation de La Place des Arts, situé derrière le mur où je suis assise, part et le ronronnement constant de la circulation d'air atteint mes tympans. Encore!  Non, mais on me cherche ou quoi! Je réussis quand même à faire fi du bruit de fond et je me concentre sur les voix, les costumes, les décors. Je réalise avec beaucoup de déception que la mise en scène ne me captive pas du tout. Les voix sont belles, mais l'ensemble est fade. À aucun moment je suis éprise par la beauté, par le jeu des acteurs.  Rien.  Je ne sens rien.

Très rapidement, c'est le deuxième entracte, beaucoup plus court que le premier.  

Un jeune homme habillé comme une carte de mode est assis à côté de moi. Il se présente et je fais de même.  Nous racontons nos tristes histoires qui nous ont obligés à nous retrouver dans les sièges de rejeton. C'est un très bel homme d'environ 1,8 mètre et je suis certaine qu'il est gai. Pas de chance. Cependant, pendant notre petite jasette, il mentionne que sa conjointe est assise un peu plus loin. Encore une fois, pas de chance. J'ai toujours eu un Gaydar défectueux! Je n'ai vraiment aucun talent pour cela. Le troisième acte débute. Malheureusement, c'est toujours aussi fade. Finalement, Violetta est allongée sur la scène. Le rideau commence à descendre. J'ai tellement hâte de partir, déçue de tout ce qui m'est arrivé depuis le début que je prenne mon sac à main, je souhaite à mon voisin une belle fin de soirée et je pars à grande vitesse. Je rencontre quelques spectateurs dans les escaliers et malgré mes « fuck me shoes », je file à toute allure et je suis une des premières à arriver à sa voiture. Mais dès que je m'assois derrière le volant et que je me calme le pompon, je réalise que quelque chose cloche.

1. Lorsque le rideau est descendu, les lumières se sont allumées, ce qui n'est pas normal à la fin d'une pièce. Les lumières auraient dû rester fermées et les applaudissements auraient dû commencer.
2. Violetta était allongée sur la scène, mais elle ne semblait pas agoniser et elle n'était certainement pas morte. Dans un opéra, l'agonie est longue et la mort certaine.
3. Dans le garage, j'étais complètement seule. Très inhabituel. Aucune circulation, aucune personne à éviter. Je me déplaçais aisément à tel point que mes pneus crissèrent en tournant les coins.
4. Dehors, le calme plat dans les rues avoisinantes.

Comme vous l'avez bien deviné, ce que je pensais être le deuxième entracte était en réalité une pause pour changer les décors! Lorsque je suis partie à la course, c'était le deuxième entracte. J'ai réalisé tout ceci en sortant du garage mais aucun regret, cette soirée était vouée à l'échec dès le début. Je suis arrivée à la maison à 21 h 30, du jamais vu suite à un spectacle.

Ma conclusion de toute cette soirée: après avoir vécu l'exceptionnelle expérience de La Bohême à La Fenice à Venise, les dieux de l'opéra ont aligné les étoiles pour que mon expérience à Venise soit la plus belle de ma vie, que les souvenirs de cette soirée soient les plus mémorables et que rien d'autre ne puisse arriver à la hauteur de cet art italien vécu en Italie.

En regardant les photos suivantes, tirez vos propres conclusions:


La Place des Arts de Montréal





La Fenice, Venise










À bientôt!

Diane